L’Actu de la Data

Le CRM expliqué par ma fille… On en apprend vraiment tous les jours ! 🙄

Il parait que plus on prend de l’âge plus le temps se rétrécit. Cela a parfois des avantages tant il me semble entrer dans un week-end à peine sorti du précédent. J’ai également l’impression que mes filles sont tout le temps en vacances mais cela doit être une vue de l’esprit.

Ce qui ne l’est pas, en revanche, c’est la durée des semestres du cursus de ma cadette, nettement plus proche des trois mois que des six. Cela a pour conséquence de la maintenir dans une certaine tension. Là où février et juin étaient les seules périodes d’apnée de mon époque, le contrôle continu de la sienne ne lui permet que peu de bouffées d’oxygène.

Lors de ses retours au nid, je la retrouve régulièrement sur son lit, emmitouflée dans sa robe de chambre, entourée de ses fiches, un bol de Smacks à portée de main.

« Dis papa, tu aurais de la laine et des aiguilles ? » me lance-t-elle samedi dernier.

Je ne cesserai jamais d’être surpris par la propension qu’ont les enfants à penser leurs parents comme des BHV ambulants.

« Parce que tu sais tricoter maintenant ? »

« J’ai eu le temps d’apprendre vu les heures que je passe dans les trains ou à les attendre sur le quai »

« Et tu veux tricoter quoi ? »

« Une écharpe pour mon prof d’Analyse du Discours Politique, c’est bientôt son anniversaire et comme il porte des mocassins en peau et des pulls ethniques, ça devrait lui plaire.

« Tu fais des cadeaux à tes profs ? »

« J’ai bien offert un bavoir vintage à ma prof de Culture Critique de l’Argumentation. Son gosse a 18 mois et elle est fan des années 60 »

« Mais comment tu sais ça ? »

« Pffff papa…ça fait quand même 18 ans que j’entends parler bases de données à la maison… alors à force…. C’est fou ce qu’on trouve en open data quand on cherche un peu d’ailleurs… »

« Mais encore ? »

« Ma prof d’économie a fait moins de 4h30 à son dernier marathon, mon prof de culture G chasse sur Tinder et ma prof d’anglais se débrouille bien à la batterie. »

« Et cela te sert à quoi, FOUCHET en jupons ! »

« A faire du relationnel, tiens ! J’ai aussi chargé une appli CRM gratos, comme ça je rentre toutes ces infos pour me les remettre en tête avant chaque cours. Cela me donne un avantage. Comprendre comment fonctionne l’autre avant d’adapter son discours et son action en conséquence, n’est-ce pas l’essence même de la politique ou du commerce ? »

« Tu as probablement raison. C’est aussi valable dans le cercle privé ? »

« Naturellement »

« Alors saches que ton père fonctionne comme un technicien de surface et qu’il aimerait que tu te déchausses avant de te vautrer sur ton lit, que tu rapportes à la cuisine les cinq bols visqueux empilés sur ton bureau, que tu vides ta poubelle et transportes tes fringues sales qui jonchent le sol dans la panière prévue à cet effet ! »


Si elle doit être amenée à élaborer les futures lois de la République autant qu’elle commence par respecter celles du foyer 😉

L’Account Based Marketing expliqué par ma mère… 🙄

Février est un mois difficile surtout quand on vit seule dans la diagonale du vide. Les fêtes sont passées et le renouveau printanier n’est pas encore présent. Il n’y a bien que les forsythias, quand ils sont en avance, pour égayer le tour de porte.

La vie sociale locale suit la même saisonnalité. Les ventres se reposent, les esprits également. Cela agace ma mère dont l’énergie ne semble pas tarir avec l’âge. Fort heureusement, le grand vide-greniers de la Saint Modeste marque le retour des interactions et lui donne l’occasion d’exercer ses talents.

Parce que ma mère, le marketing-vente, elle connait. Elle en utilise toutes les ficelles depuis des lustres, simple question de jugeotte rappelle-t-elle. Son stand a toujours son petit succès, elle n’a pas sa pareille pour appâter le chaland comme elle dit.

« Cette année, j’ai pris quatre mètres linéaires pour mieux segmenter mes prospects » m’annonce-t-elle en frétillant d’avance

« Segmenter tes prospects ? »

« Tu as oublié la règle des 80/20 ? Celle qui veut que 20% des clients fassent 80% du chiffre d’affaires ? »

« non »

« Et bien ces 20% ils auront 80% du stand qui leur sera dédié, ce sont mes cibles ! »

« Parce que tu as des cibles ? »

« Parfaitement ! Pour les jeunes Anglais retraités, le service à thé complet Limoges 1900 de la grande tante, c’est parfait ! A la fois « so frenchy » mais pas trop exotique non plus. J’ai aussi un sabre genre « grognard » très certainement faux mais le style Napoléon c’est d’actualité cette année. Je mettrai sur le devant les douilles d’obus de 14-18 sculptées… ça brille bien… ça attire l’oeil de loin et je servirai la belle histoire du poilu seul survivant de sa tranchée qui va avec. »

« Et le jeune retraité français, tu lui destines quoi ? »

« Si c’est un nouvel installé, il doit chasser la déco pour chambre d’hôtes… J’ai des vieux rabots et des niveaux à bulle en bois, une psyché 1930, un blaireau à manche de corne, un ensemble de toilette vasque et broc à détourner, les cannes à pêche en bambou de ton grand-père, bref, tout ce qui rappelle à son inconscient le regretté temps perdu qu’il n’a pourtant jamais connu. »

« Reste les actifs locaux et les enfants »

« Les actifs locaux cherchent de l’utile à pas cher… pas de gros profits avec eux… ils fouilleront dans les cartons « tout à 1 euros ». Quant aux enfants, j’ai le stock des Barbie laissées par tes filles, c’est de nouveau à la mode depuis le film et ça fait venir les parents ou les grands-parents à qui je vends autre chose par la même occasion »

« Promets moi que tu ne vas pas vendre aussi mes BIG JIM ! »

« Je suis désolé de te l’apprendre, mais la tendance est à l’homme déconstruit façon Thimothée CHALAMET », les BIG JIM, c’est bien trop genré pour le moment !


Si quelqu’un(e) connait un(e) DRH à la recherche une consultante growthacking senior ++ en full remote, je ne prends que 10% ! 🤣

Les subtilités de la nomenclature NAF expliquées à mon beau-frère

Les subtilités de la nomenclature NAF expliquées à mon beau-frère

Deux ou trois fois par an, je me plie au rituel des déjeuners en famille. La mienne n’est pas grande mais les occupations de chacun(e) font que les occasions de réunion sont rares.

Nous nous retrouvons autour d’un bourguignon ou d’une blanquette, de part et d’autre d’une longue table et selon un placement immuable : les jeunes d’un côté, les vieux de l’autre.

Je siège en bout avec mon beau-frère parce que nous sommes les pestiférés du groupe. Je bosse dans la data BtoB, lui dans le logiciel d’optimisation de trajet, deux bonnes raisons pour nous traiter en espions.

Dimanche dernier, il m’entreprend sur le difficile alignement du Marketing et du Commercial, le premier méprisant le second qui le lui rend bien.

« Tu ne connais pas la dernière ? » lâche-t-il entre deux gorgées de Pinot noir

« Non »

« Le marketing nous en a encore pondu une bien bonne »

« Raconte »

« Ils ont monté une opération de prospection vers les autocaristes. Je ne sais pas chez qui ils ont acheté la base de données, mais on a eu plein de PND (Plis Non Distribués pour les intimes) dont une bonne cinquantaine avec la même adresse à Pantin. Tous des particuliers en plus ! Il y a à boire et à manger dans ton métier ! »

« Tu me parles du NAF 4939B : Autre transport routier de voyageurs ? »

« Ça doit être ça »

« Normal »

« Comment ça, normal ? »

« On se limite souvent aux premières lignes d’une définition… le drame de notre époque ce déficit de lecture et de réflexion… Or, le Diable se cache dans les détails »

J’ai sorti mon téléphone où je garde un pdf de la nomenclature INSEE (oui… je sais… je suis un peu étrange). Je zoome sur la dernière ligne qui indique : “Cette sous-classe comprend aussi le transport de voyageurs par véhicules à traction humaine ou animale.”

« J’ai la forte intuition que ton marketing n’a pas dû exclure les 0 salariés, d’où ces personnes physiques prises pour des particuliers. Je suppose qu’il voulait garder les chauffeurs indépendants qui possèdent leur véhicule et louent leurs services. Mais il en a inclus d’autres qui sont tout à fait hors cible »

« Sacrément hors cible même ! On a encore des cochers en calèches dans le 93 ? »

« Non, mais pas mal de Tuk-tuk pour touristes à Paris avec autant d’autoentrepreneurs à leurs guidons qui doivent se partager la même boite aux lettres… d’où tes PND. Et sinon, tu te rappelles que je fais du bon fichier Flotte Automobiles ? »

Un coup sec de cuillère en bois sur les doigts fait valdinguer mon mobile sur la table.

« C’est un repas familial, on ne parle pas travail ! ». Ma tante a encore des principes et la main leste.

« Surtout quand il consiste à permettre à des employeurs d’espionner des salariés » ajoute mielleusement une de mes nièces.


Suggestion de sujet pour le BAC : Comment expliquer à une ado vissée à son IPhone qu’une appli d’optimisation de trajet peut réduire l’énergie gaspillée à livrer ses commandes Shein.

Les techniques du Lead Nurturing appliquées à mon beau-fils… oui… je sais… c’est mal… 😉

Depuis que l’aîné de ma compagne a atteint la majorité, un sujet de crispation s’invite régulièrement à la table familiale. Alors que sa mère et moi-même n’avions qu’une hâte à son âge : obtenir le permis de conduire, lui s’en tape royalement.

N’allez pas croire qu’il soit particulièrement concerné par le réchauffement climatique. Offre de transports en commun + tarif dérisoire d’un VTC de nuit pris à plusieurs + bordel circulatoire parisien = pas besoin de permis croit-il.

Parce qu’un très jeune adulte ne réfléchit pas plus loin que sa satisfaction immédiate (l’achat d’un PC GAMER ne souffrait d’aucun délai) et que sa mère me prend pour Capitaine FLAM (hashtag#refdeboomer), j’ai décidé d’utiliser une de mes Bottes de Nevers pour le faire changer d’avis.

« Tu as prévu de faire quoi cet été ? », lance-je sur un ton faussement badin tout en prélevant un morceau de Saint-Nectaire à point.

« j’sais pas… On irait bien faire un tour dans les Balkans avec mon pote Gus »

« Super idée ça ! j’ai fait pareil quand j’avais ton âge avec mon copain Arnaud, fallait voir l’aventure ! »

« Ah ouais ? T’es parti en train ou directement en avion ? »

« En RENAULT 12 BREAK, mon gars ! avec la tente et le matelas dans le coffre… on en a bouffé de la borne ! On se relayait au volant… On dormait où on s’arrêtait… on a fait la fête partout des rives du lac Balaton à celles de la mer Egée… Les meilleures vacances de ma vie !  Le train, c’est sympa, mais cela ne t’emmène pas où tu veux »

Il fait une vague moue mais je vois bien que la première banderille est plantée… le Funnel est prêt à le happer.

« Et puis… » je me mets à chuchoter pour souligner le confidentiel de la déclaration « on en a fait des rencontres intéressantes avec des autostoppeuses de l’Est… »

Seconde banderille en place… Il est temps d’agiter la muleta

« Quand je pense que la FORD de Papi prend la poussière dans un parking… ta mère pensait vous la donner à toi ou à ton frère, mais on va finir par la proposer aux cousins qui conduisent déjà »

Prétextant le débarrassage de la table, Je le laisse en plan… L’information doit faire son trajet…le prospect doit mûrir…

Dans deux jours, je poserai sur son lit une photo vieille de 35 ans… la R12 au premier plan, la méditerranée au second… des yeux rieurs… une peau cuivrée… une tête blonde sur mon épaule => TOFU

Dans une semaine, Arnaud passera à l’apéro « par hasard »… on en remettra une couche façon Iliade et Odyssée… « et tout ça sans IPhone ni internet, mon gars ! » => MOFU

Et puis… un peu plus tard… Je lui rappellerai que son anniversaire c’est dans deux mois et qu’on pourrait lancer une souscription familiale pour un cadeau sympa => BOFU

Bref… « je quarte du pied, j’escarmouche, je coupe, je feinte… A la fin de l’envoi, je touche ! »… Le Marketing doit beaucoup à Edmond Rostand.

Le SEO expliqué par ma fille… Sacrée GenZ !!!!

J’ai donc deux filles…

A la loterie de l’hérédité chromosomique, je piste chez elles ce qu’elles semblent tenir de moi… le bon comme le moins bon.

La cadette a hérité d’un certain tropisme pour le débat « politique » qui veut qu’elle ait raison jusqu’à ce qu’on lui prouve qu’elle a tort et d’une tendance au jugement à l’emporte-pièce comme à la provocation qui ne s’est atténuée chez moi qu’avec l’âge.

L’ainée c’est un autre style. Les débats c’est sur les « dancing floor » que ça se passe et les shots de vodka-carambar en sont les ponctuations. Nous nous croisons le plus souvent au petit matin lorsqu’elle rentre alors que je me lève. Si, plus jeune, je n’étais pas le dernier à écumer les nuits parisiennes, je n’ai jamais atteint ce niveau. 😱

« Je me demande comment tu fais pour être invitée dans toutes ces soirées » m’étonne-je alors qu’elle verse la moitié d’un sachet céréales dans un grand bol de lait.

« J’ai un super SEO »

« Un SEO ? on parle bien de Search Engine Optimization »

« Mouai… un peu comme la « notoriété spontanée » de ton époque »

J’aime quand ma fille me rappelle que je ne suis qu’un boomer… 😂

« Parce que tu as un site perso ? »

« Pas besoin, mes stories Insta font aussi bien le job et c’est gratos »

« Je suis curieux de voir ça »

« Vaut mieux pas… tu risquerais de perdre tes dernières illusions à mon sujet… A mon époque comme à la tienne, on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre »

« Et elles sont faites pour vendre quoi, tes stories ? »

« Elles me vendent moi »

« Si je comprends bien, tu appliques les stratégies marketing de marque que tu apprends le jour en cours à la promotion de ta vie nocturne ? »

« C’est ça… Toutes mes stories sont explicitement taguées.. Ca va de hashtag#restautropclasse pour les plus sages à hashtag#bardebombasses en passant par hashtag#shotdeouf et hashtag#cocktaildemalade… je colle aussi des liens vers des sites d’events… quant au contenu, ça fait un moment que je me débrouille en montage comme en mixage… mes posts fracturent la rétine comme les tympans… conséquence logique : Je suis invitée partout »

« Incroyable ! Ma fille est une influenceuse !!! On part quand pour Dubaï ? »

« On se calme, papa, je n’ai rien d’une Léa/Nabilla/Jessica ! Et je fais cela pour le plaisir pas pour m’offrir un penthouse de 500 m2 et avoir une AMG GT dans le garage en exploitant la crédulité des faibles d’esprit ! »

« Ingrate que tu es ! Tu pourrais penser aux vieux jours de ton père ! »

« Je peux faire en sorte qu’ils soient très animés… tu veux qu’on lance une série sur base de hashtag#sexydaron ou hashtag#monpèrecelascar ? »

« Si tu tiens absolument à voir fleurir des hashtag#jevaisatomisermabellefille en commentaire de tes posts, c’est une bonne idée !»

Les PND expliqués à ma mère…. Non, LA POSTE ne fait pas du mauvais travail !

Alerte rouge dans le Quercy Blanc ! A quelques jours du réveillon comme dans bien d’autres régions de France, un vent de panique souffle sur les boites aux lettres.

Si le foie gras est produit par la voisine, si les chasseurs ont eu la bonne idée d’offrir un cuissot de sanglier, si les légumes sortent du potager et si la viticulture cadurcienne ne manque pas de variété, il y a tout de même un inconvénient à habiter la campagne profonde : On n’y trouve pas toujours les cadeaux que l’on souhaite offrir.

Ma mère guette donc le passage du Kangoo du facteur qui n’est pas du genre à laisser un colis sur une boite aux lettres à 400 mètres de sa maison.

« Tu comprends, depuis que la mairie s’est mise en tête de renommer tous les lieux-dits avec des nouveaux numéros et noms de voies, j’ai peur que le courrier n’arrive pas » s’angoisse-t-elle lors de mon coup de fil du soir.

« Ce n’est pas une fantaisie de la commune, c’est une obligation légale depuis 2022 »

« Et bien ton obligation légale elle a quand même transformé « Les Granges Fleuries» qui existent depuis 1850 en « 417 chemin du Coubul » et outre le fait que cela est nettement moins poétique, comment veux-tu qu’ils s’y retrouvent à LA POSTE !

« Grace à la BAN »

« La BAN ? »

« La Base Adresse Nationale dans laquelle doivent être déversées toutes les BAL (les versions locales) de toutes les communes de France, et ce avant juin 2024. C’est le référentiel utilisé par LA POSTE »

« Oui mais si on m’écrit à mon ancienne adresse ? »

« La grande maison jaune l’a gardée en mémoire. Quelque part dans ses milliards de données, il y a un lien entre l’ancienne et la nouvelle »

« Alors comment expliques-tu qu’il y a des fois où le courrier n’arrive pas ? »

« Tu connais le trajet d’une lettre ? »

« Pas précisément »

« Quand la cousine Françoise t’écrit de Pornic, elle met son pli dans la boite fixée au mur du café de la rue de Verdun après avoir fait son loto. Les lettres sont récupérées et envoyées dans un centre avec celles de toutes les communes du coin. De là elles rejoindront une PIC de départ, c’est un gros centre de tri industriel où les enveloppes passent dans une machine capable d’en lire 14 à la seconde… une vraie Gatling à courrier ! »

« Jouer au loto à son âge, la Françoise… pfff »

« Si elle a renversé son café sur le code postal / ville, la machine va classer le pli en PND (Pli Non Distribué) mais il faut vraiment que ce soit illisible car le plus souvent c’est recodé par des opérateurs et ça continue son chemin vers la PIC d’arrivée pour être trié dans l’ordre de la tournée de Guy, ton facteur… et Guy, il te connait bien, à n’importe quelle adresse ! »

« C’est vrai… c’est pour cela que je lui glisse au pot de confiture de temps en temps… Il faut encourager les bonnes volontés… »

« C’est gentil »

« Et si je lui offre du champagne, tu penses qu’il peut me déclarer PND pour les impôts ? »

Le FOMO expliqué à mon beau-fils ou la stratégie Clint Eastwood 🤠

Je partage ma vie entre deux appartements. Lorsque je ne suis pas avec mes filles, je suis avec mes beaux-fils, deux solides gaillards qui me feraient presque regretter de n’avoir pas été aussi beau et bien bâti à leur âge.

Nous parlons régulièrement « entre hommes » de « sujet d’hommes » qui s’apparentent le plus souvent à des stratégies d’inbound marketing… j’entends par là faire en sorte que des « prospectes » viennent à eux sans qu’ils aient besoin de les démarcher directement (parce que c’est un truc de « charo »).

Il n’y a visiblement pas qu’en prépa que la concurrence est rude et le sujet de la fête du nouvel an préoccupe le cadet, un taiseux plutôt taciturne.

« Je voudrais bien organiser une soirée mais comme il y en a déjà pas mal de prévues, je ne sais pas comment faire venir du monde » me glisse-t-il.

Comme je sais parler le « jeune adulte », je décrypte le véritable propos sous-jacent.

« Elle s’appelle comment ? »

« Clara »

« C’est quel style ? »

« Le style à être invitée partout »

« Elle a une bande de copines ? »

« Elles sont quatre. Elles ne se quittent jamais »

« Super simple alors, il faut sortir la stratégie Clint Eastwood »

« ????? »

« Tu vois, le monde se divise en deux catégories, ceux qui courent après et ceux qui laissent venir… toi, tu vas laisser venir »

« Explique »

« Etape 1 : choix de la cible et du canal de diffusion => la bande de copines et le street marketing »

« OK »

« Etape 2 : teasing => Ton meilleur pote laisse entendre à une des copines de la bande (le meilleur relais du groupe si possible) que tu pourrais bien organiser une soirée pour le 31. MAIS ATTENTION ! PAS N’IMPORTE QUELLE SOIREE ! Un truc spécial sur lequel tu travailles depuis des semaines »

« OK, c’est quoi l’étape 3 ?»

« Une semaine plus tard : La Vente Privée => Un autre pote, sous le sceau du secret pour initiés, raconte à la même copine que tu es complètement dingue ! Que tu vas transformer l’appart de ta mère en chalet Finlandais, qu’il y aura un feu de cheminée, de la Vodka polonaise, du saumon norvégien, des aurores boréales projetées au plafond et peut-être même un canon à neige dans le salon ! »

« Maman va me tuer ! »

« Etape 4 : le FOMO (Fear Of Missing Out pour les intimes) => Un troisième pote demande à la même copine si elle a reçu une invitation… parce que les places sont limitées et qu’il y a grave de la demande ! Comme il n’y a jamais eu d’invitations, elle répondra que non. Il dira alors qu’il peut peut-être les incruster, elle et ses trois copines, mais qu’il lui faut une réponse ferme avant le lendemain… et voilà… le tour est joué.

« Et ça marche vraiment ton truc » ?

« Demande à ta mère…Ça fait bientôt 14 ans qu’elle est persuadée d’avoir déniché le meilleur bonhomme d’occasion du marché »

Le RGPD expliqué à ma fille… Avec un bon exemple, c’est assez simple. 😉

Ma conception de la paternité c’est accepter de voir ses enfants devenir adultes et ne pas faire de différence éducative entre les sexes (ou les genres comme on dit maintenant).

Mes filles m’ont toujours posé des questions qui attendaient des réponses… réponses qu’elles ont reçues, sans travestir la réalité et en fonction de leur âge. La parole reste libre entre elles et moi.

Depuis qu’elles sont jeunes adultes, le représentant de la masculinité que je suis est régulièrement pris à partie. La faute au comportement de leurs ex dont certains semblent souffrir d’une surdité précoce.

Ma cadette débarque un rien fumasse hier soir, se jette dans le canapé et entreprend de vider son sac.

« Franchement, vous êtes des gros relous les mecs ! On se demande ce que vous ne comprenez pas dans : C’EST FINI ! »

Je m’assois à ses côtés et prends ma posture d’écoute active paternelle.

« Comme je suppose que cette appréciation ne m’est pas destinée, de quel ex s’agit-il au juste ? de Tom ? de Rayan ? de Lucas ? »

« D’Enzo !!! »

« Le Enzo avec qui tu étais en seconde ? Celui qui a osé en embrasser une autre (moche en plus) et que tu as jeté dans la foulée »

« Oui, cet Enzo-là, il me saoule avec ses textos ! Il ne veut pas lâcher l’affaire depuis 4 ans !

« C’est vrai que si vos relations étaient régies par le RGPD, ce serait plus pratique »

« Qu’est ce que vient foutre ton RGPD dans mes embrouilles avec mes ex ? »

« Imagine qu’un lascar veuille récupérer ton 07 ou ton Insta. Soit il te le demande cash, c’est de la collecte directe et tu dois lui donner explicitement ton consentement (de façon libre et éclairée), soit il le demande à ta copine Lola et c’est de la collecte indirecte ce qui implique que Lola doit s’assurer que tu l’autorises à transmettre tes coordonnées à une liste préétablie de crush potentiels. »

« et après ? »

« Lors de son premier message, le gars doit s’assurer que tu es bien d’accord pour correspondre avec lui et à chaque nouvel échange, il te laisse la possibilité de le bloquer si tu n’en as plus envie »

« OK… et admettons qu’un « rapprochement stratégique » s’opère… »

« C’est qu’il y aura donc contrat entre vous. Il gardera les données qui lui seront nécessaires pour te proposer des offres complémentaires comme la sauce kebab que tu apprécies ou ton Muscadet préféré »

« Et si ça casse ? »

« Il devra effacer toute trace de tes données personnelles si tu lui en fais la demande expresse. Et si ce n’est pas le cas, il pourra les conserver pendant une durée de trois ans max au cas où tu aies un remord et que tu veuilles remettre le couvert »

« Et s’il ne veut pas les effacer ? »

« Tu le balances à la CNIL (Commission Nationale Infidélité et Largage) ! »

« Ahahahahahah ! »

Comme quoi… le RGPD peut faire passer une jeune femme de 18 ans de la colère au rire 🤣

La data expliqué à… – Les cookies expliqués à ma mère… avec l’aide de Hergé 😉

Je profite souvent de la Toussaint pour passer quelques jours chez ma mère. La température est encore douce et les paysages lotois d’automne magnifiques.

600 kilomètres séparent la frénésie parisienne du calme quercynois, l’absence de vrai ciel nocturne de la voie lactée scintillante, la pierre grise de la blanche, le zinc de la tuile canal et les marronniers des chênes.

Il y a toujours un pâté ou un magret séché fait maison pour m’accueillir et une liste de « petits trucs à faire » en complément. Rien qui ne soit à la portée d’un « bricolo de base » ce que j’aime à penser que je suis.

Cette fois, ce n’est ni une porte à raboter ni un joint de silicone à restaurer qui la préoccupe.

« J’ai l’impression qu’on m’espionne » lâche-t ‘elle à voix basse en me proposant un cabécou sur une tranche de pain.

« Tu as des ennuis avec les voisins ? »

« Pas du tout, c’est mon ordinateur »

« Ton Mac ? »

« Oui… je pense qu’il m’épie »

« Qu’est ce qui te fait dire ça ? »

« Tu sais que j’ai pour projet d’installer un poêle à bois dans la vieille cheminée qui chauffe très mal. Comme l’offre locale est assez réduite, j’ai fait une recherche pour trouver des fabricants. J’y ai passé une soirée entière. Depuis, quel que soit le site sur lequel je me trouve, je vois des poêles et des inserts qui s’affichent partout. »

« La faute aux cookies, ça »

« Les trucs qu’on me demande d’accepter à chaque fois ? »

« Oui, C’est un peu le sparadrap du capitaine Haddock, mais en mieux. Non seulement ils ne te lâchent pas, mais ils embarquent avec eux les données des pages sur lesquelles tu as passé du temps. Comme ça on peut te proposer les mêmes articles alors que tu es sur un tout autre site. C’est valable aussi pour des publicités ciblées à partir du profil qu’on tire de ton historique de navigation »

« Et pour mon téléphone, c’est pareil ? Pare ce que la semaine dernière, j’avais Bernadette à goûter. On jacassait de la croisière pour célibataires qu’elle veut faire en méditerranée… à son âge… je te jure…enfin bref… et bien je te le donne en mille, dès le lendemain, j’avais des pubs plein mon téléphone !

« Difficile de savoir s’il t’écoute vraiment. Si tu utilises un assistant vocal, c’est certain. Si tu as donné accès à ton micro aux applis que tu as chargées, c’est probable. Le sparadrap est différent mais la finalité est la même : Te proposer ce que tu peux être amenée à désirer. »

« Et ça marche ?»

« Les annonceurs n’ont pas la fibre philanthropique, tu sais… »

La discussion s’achève sur une vieille prune. Je rejoins ma chambre et l’entends parler un peu fort au chien dans la sienne, le téléphone en mains.

« … hein Noisette, un BEAU JARDINIER MUSCLE, tu en penses quoi ? Ce serait bien de trouver un BEAU JARDINIER MUSCLE… je suis certaine que tu n’es pas contre un BEAU JARDINIER MUSCLE, hein Noisette… »

Je suis curieux de voir qui de l’homme ou du fruit va lui être proposé…

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